Page:Sand - Cadio.djvu/128

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coups de sabre. Je vous ai vu travailler la bande de Saint-Gueltas tantôt. Vous alliez bien !

HENRI. Moi, je suis un homme. Les femmes ont d’autres devoirs.

CHAILLAC. Des devoirs contraires au salut de la patrie ? Diable, non ! Je ne veux pas vous accorder ça, jeune homme.

HENRI. Si la générosité du cœur est un crime, accordez-moi la grâce de cette jeune fille.

CHAILLAC. Je serais heureux de rendre hommage à un militaire tel que vous, mais cela m’est impossible. La mauvaise herbe repousse sous la faux révolutionnaire. Il faut l’arracher, tiges et fleurs ; tant pis pour la jolie fille ! Je ne suis plus jeune, moi, Cupidon ne me chatouille plus les yeux. Mademoiselle Hoche ira rendre compte de ses faits et gestes au tribunal d’Angers.

HENRI. Mon capitaine va venir vous dire…

CHAILLAC. Je ne reconnais pas l’autorité de votre capitaine. Le militaire n’a rien à voir dans nos affaires civiles. J’ai des pouvoirs extraordinaires des délégués de la Convention. Mon mandat est d’envoyer les suspects devant leurs juges naturels.

HENRI. Mais c’est de votre propre autorité que vous qualifiez de suspectes et traitez comme telles les personnes qui vous inspirent de la méfiance. Si vous vous trompez…

CHAILLAC. Je peux me tromper : errare humanum est ! Le tribunal examinera, je m’en lave les mains. Il s’est passé au château de Sauvières, en votre absence, des choses que j’ai sur le cœur. On y a lâchement assassiné un magistrat, un homme de bien que j’ai juré de venger !

HENRI. De venger sur la personne d’une pauvre enfant