Page:Sand - Cadio.djvu/185

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qui nous détestent… (Au délégué, qui s’est versé de l’eau-de-vie et lui arrêtant la main.) Ne bois pas cela ! j’en ferai l’épreuve le premier.

LE DÉLÉGUÉ, influencé. Du poison peut-être ? Bouquin, tu es un Spartiate !

LE DEUXIÈME SECRÉTAIRE. Nous t’avons suivi, connaissant bien les embûches dont nous aurions à te préserver au péril de notre vie… et, à présent que nous voyons la tienne entre les mains d’un Sauvières…

LE DÉLÉGUÉ, effrayé. Vous croyez qu’il me laisserait assassiner ?

LE PREMIER SECRÉTAIRE. Ce serait si facile ! On donne le mot à une bande de brigands qui ont bien vite dispersé cinquante hommes sans dévouement ni conviction.

LE DÉLÉGUÉ. Non, je ne puis croire à tant de scélératesse ! Vous êtes malades de peur tous les deux !

LE PREMIER SECRÉTAIRE. Peur, nous qui combattons tes instincts de douceur et de clémence, sauf à nous faire mettre en pièces à tes côtés ?

LE DÉLÉGUÉ. C’est vrai ; pardon, mes enfants, vous êtes des héros, et, moi… je suis affaibli, c’est vrai ; je suis malade. Ah ! cette pauvre tête est transpercée de douleurs aiguës, quand elle m’est pas remplie de visions effroyables !

LE PREMIER SECRÉTAIRE. Voyons, où as-tu mal ? tu n’en sais rien ?

LE DÉLÉGUÉ, appliquant la main sur sa nuque. Là, toujours là ! voilà le siége du mal.

LE PREMIER SECRÉTAIRE. Un rhumatisme ! Bois ; à présent, tu peux boire. Cette liqueur est innocente. (Ils se versent de l’eau-de-vie et boivent tous les trois.)