Page:Sand - Cadio.djvu/32

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REBEC. Eh bien, mes approvisionnements, mes bestiaux, mes lits, mon linge, et mes deux servantes que je ne suis pas d’avis d’abandonner aux hasards d’une jacquerie !

LE MOREAU. Vous prenez vos précautions ; mais où menez-vous tout cela ?

REBEC. Tiens ! ici, pardieu !

LE MOREAU. Ici ?

REBEC. Et où donc mieux ? Je ne suis pas le seul qui vienne se mettre à l’abri du pillage derrière les mâchicoulis du ci-devant seigneur de la province. Mes voisins de la grand’rue et ceux du Vieux-Marché aussi, enfin tous ceux qui ont quelque chose à perdre, nous sommes une douzaine, avec nos charrettes, nos bêtes et nos gens, qui avons résolu de nous retrancher céans, que la chose plaise ou non à M. le comte. Nous avons fait la part du feu, et nous sauvons le meilleur dans les caves et greniers de la féodalité. Il faut bien que ça nous serve à quelque chose, les châteaux que nous avons laissés debout !

LE MOREAU. Vous êtes fous ! Si M. de Sauvières nous trahissait…

REBEC. Raison de plus, c’est prévu, ça ! S’il ne se conduit pas bien à la ville, s’il tourne casaque, comme on dit, nous lui fermons au nez les portes de son manoir, nous gardons ses dames et ses hôtes comme otages. Les murs sont bons, ici, beaucoup meilleurs que l’enceinte délabrée de Puy-la-Guerche, et, quand il s’agit de soutenir un siége, vive une petite forteresse bien située comme celle-ci ! Ah ! voilà mon convoi ! Je cours…