Page:Sand - Cadio.djvu/328

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HENRI. Tu as du dépit… un dépit tout personnel… Tu dois mentir !

LA KORIGANE, frappant du pied. Tu ne me crois pas ? Misère et malheur ! Voilà ce que c’est !… Ah ! je le sais bien, que, pour Saint-Gueltas, je peux faire tout ce qu’il y a de plus mal ; mais, quand je veux faire le bien une fois dans ma vie, on me dit : « Tu mens !… » Allons ! qu’il la trouve où elle est ! Sachant où vous êtes, il ne l’accusera pas moins d’être venue ici pour vous. C’est tant pis pour toi, pauvre Louise ! Dieu sait pourtant que je te plaignais, toi si malheureuse, et que, si j’avais pu finir par aimer quelqu’un, c’est toi que j’aurais aimée !

HENRI, frappé de la voir pleurer. Explique-toi tout à fait ; dis toute la vérité ! Pourquoi quitte-t-elle son mari ? L’a-t-il menacée, maltraitée ?

LA KORIGANE. Il a fait pis, il l’a avilie ! L’autre est venue demeurer chez lui ; elle a traité Louise comme une vraie servante. Elle a su que par moi elle envoyait des lettres en secret : c’étaient des lettres à mademoiselle Hoche ; elle a fait croire au maître que c’étaient des lettres pour vous.

HENRI. Il ne le croit plus ; tout peut être éclairci. Va chercher Louise et sa tante.

LA KORIGANE. J’y cours.

HENRI. Et puis tu tâcheras de trouver Saint-Gueltas ; tu lui diras que je l’attends et que sa femme est chez moi.

LA KORIGANE. Tu veux te battre avec lui ?

HENRI. Je veux qu’il me rende compte de sa conduite envers elle.

LA KORIGANE. Henri de Sauvières, ne fais pas cela ! on ne tue pas Saint-Gueltas, c’est lui qui tue les autres.