Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/27

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par les cris d’un petit oiseau qu’elle élevait en cage et qui n’avait rien à manger. Comme il troublait la leçon de musique et que d’ailleurs je ne puis voir souffrir, je me levai pour lui donner du pain. Césarine parut ne pas s’en apercevoir ; mais après la leçon elle emporta la cage dans sa chambre, et j’entendis bientôt que le jeûne et les cris de détresse recommençaient de plus belle. Je lui demandai pourquoi, puisque cette petite bête savait manger, elle ne lui laissait pas de nourriture à sa portée.

— C’est bien simple, répondit-elle. S’il peut se passer de moi, il ne se souciera plus de moi.

— Mais si vous l’oubliez ?

— Je ne l’oublierai pas.

— Alors c’est volontairement que vous le condamnez au supplice de l’attente et aux tortures de la faim, car il crie sans cesse.

— C’est volontairement ; j’essaye sur lui la méthode de mon père.

— Non, ceci est une méchante plaisanterie ; cette méthode n’est pas applicable aux êtres qui ne raisonnent pas. Dites plutôt que vous aimez votre oiseau d’une amitié égoïste et cruelle. Peu vous importe qu’il souffre, pourvu qu’il s’attache à vous. Prenez garde de traiter de même les êtres de votre espèce !

— En ce cas, dit-elle en riant, ma méthode diffère de celle de mon père, puisqu’elle ne s’applique qu’aux êtres qui ne raisonnent pas.

J’essayai de lui prouver qu’il faut rendre heureux