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I.


Le 50 juin 1805, madame de Valangis était dans son vieux carrosse de campagne, étrange monument composite qui tenait de la calèche, de la patache et du landau, mais qui n’était précisément rien de tout cela. C’était un de ces véhicules de fantaisie que les fabricants de province inventaient au gré des personnes sous le Directoire, époque de transition, de tâtonnement et de caprice dans tous les genres. La voiture, étant lourde et solide, durait encore, et madame de Valangis ne se souciait plus d’aucun changement dans ses habitudes. Elle avait échappé aux orages de la Révolution en se tenant coi dans son château de Bellombre, au fond d’une gorge des montagnes de la Provence, et en cachant de son mieux sa fortune, qui était médiocre, et ses principes, qui étaient modérés. C’était la meilleure des femmes, peu cultivée littérairement parlant, mais douce, affectueuse, dévouée, et chez qui les instincts du cœur ne se trompèrent jamais. Ce n’est pas elle qui eût livré Toulon aux Anglais et