Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/149

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boutique madame Capeforte avec une femme que je ne reconnus pas d’abord sous la mante noire dont elle était embéguinée. Je ne faisais même aucune attention à cette femme, lorsqu’elle se jeta sur moi et m’embrassa plusieurs fois coup sur coup sans me donner le temps de respirer. C’était ma pauvre Denise, si changée et si enlaidie que je ne pus retenir mes larmes en lui rendant ses caresses.

Comme elle faisait grand bruit de sa joie de me revoir et menaçait d’attrouper les passants, madame Capeforte nous fit passer dans l’arrière-boutique en me disant tout bas :

— Ne craignez rien, elle est toujours un peu trop démonstrative ; mais elle n’est plus folle puisque je sors avec elle, comme vous voyez.

Je n’avais nullement peur, et, Jennie étant avec moi, j’étais bien sûre que ma grand’mère ne me blâmerait pas de témoigner de l’intérêt à ma nourrice. Denise essaya d’abord de se calmer et de causer avec moi ; mais la vue de Jennie lui inspira une jalousie soudaine, et je vis bien, à ses yeux ardents et à sa parole brève, qu’elle était loin d’être guérie. Tout ce que Jennie put lui dire pour l’apaiser augmenta son dépit, et, se levant tout à coup :

— Vous n’êtes qu’une menteuse et une intri-