Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/152

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— Mais elle ne déteste pas Denise ; elle la soigne, elle la prêche, elle la promène. Non, madame Capeforte ne s’attendait pas à la voir comme cela !

— Soit ; mais est-ce que tu crois, Jennie, que Denise a toujours été folle ?

— C’est ce que je voulais aussi vous demander. Avez-vous jamais ouï dire qu’elle fut déjà bizarre, du temps qu’elle était votre nourrice ?

— Non, jamais. Elle embrouille ses souvenirs. Il est bien certain qu’elle a voulu me tuer, mais c’est à la fin de son dernier séjour chez nous.

Et je racontai à Jennie comment Denise avait voulu me jeter hors de la voiture, la dernière fois que je m’y étais trouvée avec elle. Jennie me fit entrer dans tous les détails qu’il me fut possible de lui donner, et, comme elle m’écoutait avec attention :

— Sais-tu, lui dis-je, frappée de sa physionomie inquiète, que tu as l’air de penser que j’ai été tuée ?

— Je ne peux pas le penser, dit-elle en souriant de ma naïveté, puisque vous voilà ici.

— Sans doute, Jennie ; mais si je n’étais pas moi ? Voyons ! si Denise avait jeté la vraie Lucienne dans le torrent sans savoir ce qu’elle faisait, et qu’ensuite celle qu’elle y voulait jeter encore fût une fausse Lucienne comme elle le prétend ?