Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/154

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grand’mère, que je ne connaissais pas. Je ne parle jamais de cela avec personne. Je ne voudrais pas faire de la peine à ma bonne maman ; mais, je te le dis, à toi, j’ai été bien longtemps sans l’aimer, et même encore à présent quelquefois, quand je pense à l’autre, malgré moi je me figure que je n’ai jamais chéri personne autant qu’elle.

Soit que Jennie ne fût pas celle dont je parlais, soit qu’il lui fût interdit formellement de me rien révéler, et qu’elle sût se résigner à mentir dans l’intérêt de mon repos, elle détourna mes soupçons, et même elle me gronda un peu de préférer à ma grand’mère un fantôme que j’avais peut-être rêvé.

— Je veux bien me persuader cela, si c’est mal de me souvenir, lui répondis-je ; mais je ne sais pas pourquoi je ne pourrais pas être ta fille et chérir ma grand’mère.

— Vous dites des enfantillages, Lucienne ! Vous êtes trop grande pour dire ces choses-là. Si vous étiez ma fille, vous ne seriez pas la petite-fille de madame de Valangis, et Denise aurait bien raison de me traiter d’intrigante et de menteuse ; car j’aurais trompé votre bonne maman, ce qui serait odieux.

— Ce que tu dis là me ferme la bouche. Je n’y songeais pas, et ce que Denise a dit me faisait