Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/175

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Frumence m’écoutait et me regardait avec une admiration naïve. Personne n’était moins pédagogue que lui, et pour la première fois je me rendis bien compte de son humeur modeste et bienveillante. Il ne me demanda pas si je continuais à m’instruire un peu sérieusement et n’eut pas l’air de douter que miss Agar ne l’eût remplacé auprès de moi avec avantage. Il ne me parlait que de choses qu’il supposait me devoir être agréables. Il pensait que je devais aimer la musique et le dessin, et il m’estimait bien heureuse d’être à bonne école. Il avait eu par hasard des renseignements sur Marius, et il était enchanté d’avoir à me dire que Marius plaisait toujours à tout le monde par ses jolies manières et son charmant esprit.

Je me sentis portée à la confiance, et mon petit jugement, qui sortait de ses langes, me fit lui répondre que miss Agar ne m’apprenait rien, vu qu’elle ne savait rien.

— Quant à Marius, ajoutai-je, il ferait bien d’être un peu moins aimable et un peu plus aimant.

Frumence réprima un moment de surprise en m’entendant parler ainsi. Il était un peu embarrassé, ne sachant plus s’il avait devant lui une enfant ou une jeune personne. J’étais dans cet âge indécis où l’on n’est ni l’une ni l’autre, et il semblait très-craintif en même temps que très-sympa-