Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/191

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faiblesse, qui l’attirait dans une complication de dévouements mal définis. Frumence ne croyait qu’à ce qu’il pouvait définir. Il doutait de lui devant l’incertain et s’effrayait presque devant l’inconnu ; c’était là sa vertu et son défaut. Il aimait trop les gens à force de se défendre de les aimer, et il était homme, après avoir dit cent fois : « Je n’y pourrai rien, » à se jeter pour eux dans tous les périls, sans raisonner davantage et sans regarder derrière lui.

À l’appel de mon amitié, la sienne se livra sans autre résistance.

— Vous savez bien, me dit-il ingénument, que je vous aime de tout mon cœur et que je serai à vos ordres ; mais c’est à une condition, c’est que votre grand’mère n’enverra plus de cadeaux ici. Nous aurions pu nous faire une cave avec toutes les bouteilles de vin vieux et une confiserie avec toutes les friandises que cette bonne dame nous fait passer ; mon oncle en a encore pour longtemps, et, moi, je ne fais aucun cas de ces douceurs-là ; et puis cela ressemblerait à un payement, et, vous l’avez dit, ma chère Lucienne, il n’y a plus de maître ni d’élève ; il y a deux amis qui causeront ensemble quand il vous plaira… c’est-à-dire quand ce sera nécessaire.

Je sus bien rendre la chose nécessaire, je m’em-