Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/233

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Je n’étais pas tant révoltée de sa stupidité qu’indignée de l’amour qu’elle m’attribuait pour Frumence. Descendre de mon rôle d’idole mystérieuse pour me voir en lutte avec cette plate rivale, c’était une humiliation qui m’empourprait le visage jusqu’à la racine des cheveux, et, si Galathée ne se fût sauvée à temps, je crois que je l’aurais battue.

Je me radoucis devant son repentir, et j’eus tort. Je n’aurais pas dû souffrir que cette fille sans culture et sans idées, sans défense par conséquent devant les appétits ardents qui se développaient en elle, m’initiât à ses illusions, à ses langueurs, à son besoin physique du mariage. Je ne soupçonnais pas ce qu’il y avait de brutal au fond du stupide roman dont elle me régalait. Peut-être n’y voyait-elle pas bien clair elle-même ; j’aime à croire qu’elle ne savait pas tout ce qu’elle avait l’air de savoir, car elle se servait d’expressions consacrées dans certain langage de confessionnal, et qui étaient d’une crudité révoltante.

Heureusement, je ne les comprenais pas, et je ne consentis pas à les deviner ; mais, à force d’entendre cette fille se lamenter lâchement sur les ennuis de la solitude ou sur ce qu’elle appelait la méfiance et la rigueur de son amant, je pris un contre-pied d’une exagération réelle : je regardai