Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/252

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— Tu as tort. Il faut, avant tout, savoir ce que l’on peut être dans la vie. Tu es un bon parti, et tu dois comprendre que cela te classe parmi les personnes indépendantes dans la société.

— Soit ; mais que ferai-je de cette indépendance ?

— Ce qu’en font toutes les femmes : tu te marieras.

— C’est-à-dire que je me dépêcherai de renoncer à cette indépendance si précieuse ?

— Tu te fais du mariage une idée fausse. Ce sont les malheureux et les petites gens pour qui le mariage est un joug. Les gens comme il faut ne songent pas à s’opprimer mutuellement.

— Qui les en empêche ?

— Quelque chose de très-fort et qui gouverne le monde : le savoir-vivre.

— Voilà tout ?

— Voilà tout, mais c’est tout. Tu crois à la religion, à la vertu, à l’amour peut-être ?

— Eh bien, et toi ?

— Moi, je crois à toutes ces choses aussi, mais en tant qu’elles font partie de la chose principale que j’appelle le savoir-vivre, c’est-à-dire le respect de soi et la crainte de l’opinion.

— Tout cela me paraît bien froid. Marius !

— Ma chère, il n’y a que le froid qui conserve, le chaud corrompt tout.