Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/54

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feuilles, les rosiers grimpants, les bignones et les jasmins des Açores, dont les berceaux s’étaient, dans le principe, arrondis sur les piliers à l’italienne qui dessinaient les allées du parterre ; leurs guirlandes s’entre-croisaient de toutes parts sur des fils de fer, si bien que tout le jardin en terrasse était couvert de fleurs et de feuillages. Les plantes basses en avaient nécessairement disparu, on les cultivait au flanc de la colline. Ma grand’mère vivait sous son berceau et chérissait exclusivement certains arbustes exotiques dont jadis son mari avait, de ses lointains voyages, apporté la semence, entre autres un pittospore de Chine qui était devenu un arbre véritable, et dont le tronc lisse et noir se penchait en dehors de la terrasse et masquait un peu aux fenêtres du salon la grande et sereine perspective de la mer. On se résignait à sortir pour la regarder. Le pittospore était si beau, si chargé de fleurs au printemps, il donnait une ombre si persistante, et un arbre de cette espèce et de cette venue était si rare en France, que c’eût été un sacrilège même de l’ébrancher.

Naturellement je trouvais le jardin de la terrasse un peu étroit et un peu fermé. Je préférais le précipice de la Salle verte, où l’on arrivait par le potager quand l’eau était basse, mais où j’aimais à pénétrer par un passage étroit et dangereux sur