Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/278

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dans le tas, ce qui est bien rare, car on dit qu’ils volent plus vite que les grains de plomb du fusil. Je conviens que ce sont des oiseaux extraordinaires, ils pondent dans les nuages, et c’est le vent qui les couve.

— Non, mon oncle, reprit vivement Clopinet ; si ce sont des oiseaux, des courlis, comme vous les appelez, ils ne pondent pas dans les nuages, et si ce ne sont pas des oiseaux, si ces voix sont celles des esprits, comme j’en suis sûr, ils ne pondent pas du tout. Que leur chant ressemble à celui des courlis, c’est possible ; moi aussi, la première fois que je les ai entendus, j’ai dit : Voilà des oiseaux de nuit qui passent ; mais, en les écoutant bien, j’ai compris leurs paroles. Ils m’ont appelé, ils m’ont fait pousser des ailes, ils m’ont appris à courir sans me mouiller, sur la mer, la nuit que j’ai passée sur la Grosse-Vache-Noire ; ils m’ont aidé à m’envoler de chez vous par la lucarne de votre maison, enfin ils m’ont secouru et consolé. Je crois en eux, je les aime, et partout où ils me diront d’aller, je les suivrai.

— Et pourtant, reprit l’oncle, tu ne les as pas suivis tout à l’heure ?

— Ils n’ont pas voulu ; mais ils m’ont bien montré, en quittant le bord de la mer, que je ne devais pas m’embarquer cette nuit. Ils ont volé de ce côté-ci, du côté du midi. Dites-moi si c’est par là que mon pays se trouve ?

— C’est par là certainement, à trois lieues de la mer en droite ligne.

— Eh bien ! c’est par là qu’il me fout aller dès de-