Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/305

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dans les sables mouillés par la marée. En l’absence de Clopinet, tout cela avait prospéré et s’était répandu jusqu’au seuil de la grotte, et tout cela allait pour jamais disparaître sous l’envahissement implacable de la marne lourde et compacte, stérile par elle-même et stérilisante quand elle n’est pas mêlée et bien incorporée à des terres d’autre nature. Et puis, avec un peu de temps, ou peut-être très-vite, sous l’action des agents extérieurs comme la pluie et la foudre, elle devait combler tout le jardin et toute la grotte. Clopinet était trop attentif et trop habitué à surveiller l’état des glissements de cette marne pour craindre d’être trop brusquement surpris par elle. Pourtant il ne dormait plus, comme on dit, que d’un œil ; et il comptait les jours en se disant : — Voici encore une belle journée qui sèche toute cette boue ; mais, s’il pleut demain, il me faudra peut-être déloger vite et regarder la fin de mon petit monde.

Dans cette attente, pour sauver ses oiseaux du désastre, il résolut de les porter au curé de Dives, sachant qu’il aimait à conserver des bêtes vivantes, tandis que le baron de Platecôte les aimait mieux mortes et empaillées. Le curé était plus naturaliste, le baron plus collectionneur. Clopinet, certain que le curé donnerait des soins à ces volatiles, s’en alla couper des bûchettes dans la campagne et se mit à confectionner un panier assez grand pour emporter tout son monde sans l’étouffer ; mais il songea que ce serait trop lourd pour lui seul, car il y avait de très-grands oiseaux, et il s’en alla louer un âne qu’il