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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

qu’il ne manquerait plus que cela pour m’achever.

Après tout, je m’en moque un peu ; l’opinion que je respecte, c’est celle de mes amis. Je me passe du reste. Je ne vois pas que cela m’ait empêchée jusqu’à présent de vivre sans trop de souci, grâce à Dieu et à quelques bipèdes qui m’accordent leur affection.

Je n’ai pas parlé de Jules à M. de Latouche ; sa protection n’est pas très facile à obtenir, m’a-t-on dit. Sans la recommandation de votre maman, j’aurais pu la rechercher longtemps sans succès. J’ai donc craint qu’il ne voulût pas l’étendre à deux personnes. Je lui ai dit que le nom de Sandeau était celui d’un de mes compatriotes qui avait bien voulu me le prêter.

En cela, je suivais son conseil ; car, il est bon que je vous le dise, M. Véron, le rédacteur en chef de la Revue, déteste les femmes et n’en veut pas entendre parler. Il a les écrouelles.

C’est à vous de savoir s’il est à propos d’expliquer à votre maman pourquoi le nom de Sandeau va se trouver dans la Revue et si elle n’en parlera point à M. de Latouche. Il vaudrait mieux lui dire que Jules me prête son nom. Quand nous serons assez avancés pour voler de nos propres ailes, je lui laisserai tout l’honneur de la publication et nous partagerons les profits (s’il y en a). Pour moi, âme épaisse et positive, il n’y a que cela qui me tente. Je mange de l’argent plus que je n’en ai ; il faut que j’en gagne, ou que je me mette à avoir de l’ordre. Or ce dernier