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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

puisque vous êtes dans cet âge et dans cette disposition à l’expansion que j’ai fermée en moi à clef, comme un tiroir contenant ce qu’on a de plus précieux, et ce qu’on ne doit ouvrir que quand on en peut tirer le bonheur d’autrui. Que pourrais-je donc tirer d’utile pour vous de mon tiroir (puisque la métaphore y est, laissons-la) ? Serait-ce de la louange ? Vous n’en manquez pas, et je crains même que vous n’en ayez un peu trop autour de vous. Je trouve, dans la manière dont vous me parlez de vous-même, une confiance un peu exaltée dont je voudrais vous voir rabattre pour travailler vos vers plus consciencieusement et à tête refroidie, le lendemain de l’inspiration.

Voyons ce qu’il y aurait dans le tiroir encore : de l’amitié, de la sympathie ? un véritable intérêt ? sans doute, vous savez que le coffre en est plein, et, si vous étiez comme moi, vous ne devriez pas aimer à abuser dans les mots des plus saintes choses du monde, en faisant trop prendre l’air aux reliques de l’âme.

Troisièmes reliques du tiroir : des avis, des avertissements, des sermons affectueux dans l’occasion ? Eh bien ! si vous récapitulez, vous verrez que j’ai déjà maintes fois ouvert le tiroir pour vous écrire quand cela était utile. Je vous ai envoyé, pour commencer, l’amitié, l’intérêt, la sympathie, l’approbation, la louange sincère et méritée ; et puis, ensuite, les sermons affectueux et les avis pleins de sollicitude. Si je le rouvrais toutes les semaines pour vous approuver, je vous donnerais de la vanité, et je vous ferais du