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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

silence du vieux qui a l’air d’être plongé dans une espèce de divagation intérieure, de rêverie à moitié hors de ce monde, était beaucoup plus beau que celui qui sert des bœufs sur des plats d’or.

Il y avait double bail à examiner, celui de Polyte avec le père Lamouche (fermier à métayer) et celui de moi aux Meillant, le tout passant à ces derniers. Lamouche avec sa mine patibulaire faisait un contraste. Il avait l’air de ne rien comprendre, et, quand on lui disait : « Suivez-vous ? » il répondait : « J’y comprends rin, c’est ça des affaires que j’y counais rin di tout. » Finesse de paysan pour faire ensuite à sa guise, en alléguant qu’on n’a pas compris, ou mal compris ses engagements. Denis le regardait avec ses yeux ronds en lui disant : « J’vous l’espliquerons bin, père Lamouche, ayez pas peûr ! » Je crois bien qu’en effet ledit Lamouche sera forcé de marcher droit avec eux, ce qu’il ne faisait guère avec Polyte, lequel avait beaucoup trop de faiblesse et de bonté. Je m’ôte là une épine du pied.

Nous travaillons toujours à organiser le journal la Conscience populaire, ou quelque chose comme ça. Je viens d’écrire à M. de Barbançois de venir dîner avec moi bien vite avant mon départ.

Je t’ai déjà répondu pour Solange, en ce qui concerne la pension. Elle y rentre sans humeur, et je lui promets de travailler à organiser ses études à la maison dans le courant de l’hiver. Elle paraît bien décidée à travailler, et (vois, ô miracle ! jusqu’où va sa