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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Et puis je suis fâchée aussi que vous vous mettiez en bisbille avec Proudhon. Je sais bien les côtés qui nous blessent et qui ne nous iront jamais en lui. Mais quel utile et vigoureux champion de la démocratie ! quels immenses services n’a-t-il pas rendus depuis un an ! Cela fait mal à tous ceux qui voient les choses naïvement et d’un peu loin, de vous trouver en guerre un beau matin ensemble, quand on a besoin que les forces vives de l’avenir marchent d’accord. Et songez que c’est le grand nombre qui voit comme cela. On lit le pour et le contre, et on conclut en disant : « Ils ont raison tous deux à leur point de vue. Donc, ils ont tort de ne pas réunir leurs deux raisons dans une seule qui nous profite. »

Cela ressemble à un paradoxe, à des raisons de malade pour mon compte ; mais la majorité de la France est femme, enfant et malade. Ne l’oubliez pas trop. Il faut des flambeaux comme votre esprit ardent et jeune. Je ne voudrais pas souffler dessus. Mais je voudrais aussi ne pas vous voir brûler trop, en courant, ce qui peut être conservé et ce que nous serons bien forcés d’avoir avec nous quand la flamme sera partout.

Bonsoir, mon ami. Croyez que mon cœur est avec ceux qui combattent, avec vous, par conséquent.

GEORGE.