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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

bon cœur. Dites-lui que je ne suis plus d’âge à le priver et à me priver moi-même d’une si sincère marque d’amitié et que je compte bien le recevoir à bras ouverts. Si, tous deux, vous me privez de ce plaisir, au revoir donc à Paris, le mois prochain, si vous n’êtes pas repartis pour quelque Silésie ou autres environs.

Avant de vous serrer ici la main, en remerciement de votre bonté pour moi, je veux vous la serrer d’une manière toute désintéressée pour le joli livre que je suis en train de lire[1]. C’est charmant de retrouver Charlotte et Manon et Virginie et tous ces êtres qu’on aime tant et qu’on a tant pleurés ! L’idée est neuve, singulière et paraît cependant toute naturelle à mesure qu’on lit. Il est impossible de s’en tirer plus adroitement et plus simplement. Si vous me gardez Paul et Virginie purs et fidèles, comme je l’espère, je vous remercierai doublement du plaisir de cette lecture. Vous avez réussi à faire parler Gœthe sans qu’on s’en offusque. Au fait, il n’était pas meilleur que cela, et vous ne lui donnez pas moins de grandeur et d’esprit qu’il n’en savait avoir. J’entends crier un peu contre la hardiesse de votre sujet ; mais, jusqu’à présent, je n’y trouve rien qui profane, rabaisse ou vulgarise ces types aimés ou admirés. J’attends la fin avec impatience. Adieu encore, et, de toute façon, à bientôt, et à vous de cœur.

GEORGE SAND.
  1. Le Régent Mustel.