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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

et tu oublies tes commissions. Amuse-toi, c’est fort bien, « nous n’en doutons pas », comme on dit à Dun-le-Carrik ; mais il faut faire marcher de front les affaires et les plaisirs, ni plus ni moins qu’un petit Buonaparte. Songe que, si je suis en retard, et que je paye mille francs d’amende par quinzaine, ça ne sera pas du tout drôle. Or j’arrive dans très peu de jours à l’époque de la vie de mon père où je ne sais plus rien. Les Villeneuve n’en savent rien non plus. J’ai écrit au général Exelmans ; mais il est à Bayonne, et Dieu sait quand il me répondra, Dieu sait de quoi il se souviendra. Mon oncle doit savoir les campagnes que mon père a faites depuis 1804 jusqu’à 1808. Demande surtout les états de service ; avec cela, on est sûr des principaux faits. Vite, vite et vite !

Rien de changé ici, en dehors de ton absence, qui fait un grand changement. Borie est encloué comme un canon, c’est-à-dire qu’il a un clou je ne sais pas où, mais je présume que c’est dans un vilain endroit. Il est sens dessus dessous à l’idée qu’on va faire une révolution dans Paris. Mais je n’y vois pas de prétexte raisonnable dans l’affaire des banquets. C’est une intrigue entre ministres qui tombent et ministres qui veulent monter. Si l’on fait du bruit autour de leur table, il n’en résultera que des horions, des assassinats commis par les mouchards sur des badauds inoffensifs, et je ne crois pas que le peuple prenne parti pour la querelle de M. Thiers contre M. Guizot. Thiers vaut mieux à coup sûr ; mais il ne donnera pas plus de