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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

reux ici, on admire la pierre, on oublie les hommes. »

Eh bien non, je ne veux rien admirer, rien aimer, rien tolérer dans le royaume de Satan, dans cette vieille caverne de brigands. Je veux cracher sur le peuple qui s’agenouille devant les cardinaux. Puisque c’est le seul peuple dont il soit permis de parler, parlons-en ! celui dont on ne parle pas est hors de cause. Si quelqu’un prend, grâce à moi, Rome, telle qu’elle est aujourd’hui, en horreur et en dégoût, j’aurai fait quelque chose. J’en dirais bien autant de nous, si on me laissait faire ; mais on a les mains liées, et je n’insiste jamais pour que d’autres s’exposent à ma place.

Et puis, d’ailleurs, nous autres Français, nous ne sommes jamais si laids qu’un peuple dévot et paresseux. Nous nous trompons, nous nous grisons, nous devenons fous. Mais pourrait-on faire de nous ce que l’on a fait de Rome ? Chi lo sa ? peut-être ! Mais nous n’y sommes pas.

Il est donc bon de dire ce qu’on devient quand on retombe sous la soutane, et j’ai très bien fait de le dire à tout prix. Cela doit fâcher des cœurs italiens ; s’ils réfléchissent, ils doivent m’approuver.