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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

suis sûre que tu en sortiras plus heureux encore que tu ne l’étais auparavant.

Sois sûr aussi que tous tes amis se préoccupent de toi vivement et que, si tu les entendais parler de toi entre eux, tu verrais combien ils te sont attachés. Au reste, nous sommes tous d’accord avec ton médecin pour croire fermement qu’une fatigue ne peut pas produire un mal qui résiste au repos.

Je vois qu’on s’amuse autour de toi et que tu diriges toujours, en vrai Boccaferri[1], les amusements et les projets de la famille. Combien je regrette d’être clouée au travail et de ne pouvoir aller vous applaudir !

Mais chacun a ses liens bien serrés par moments ! Je griffonne toujours pour arriver à des jours de liberté qui s’envolent trop vite quand je les tiens. C’est l’histoire de tous ceux qui tirent leur revenu de leur industrie.

Dans mes soirées d’hiver, j’ai entrepris l’éducation de la petite Marie, celle qui jouait la comédie avec nous. De laveuse de vaisselle qu’elle était, je l’ai élevée d’emblée à la dignité de femme de charge, que sa bonne cervelle la rend très propre à remplir. Mais un grand obstacle, c’était de ne pas savoir lire. Ce grand obstacle n’existe plus. En trente leçons d’une demi-heure chacune, total quinze heures en un mois, elle a tu lentement, mais parfaitement, toutes les difficultés

  1. Personnage du Château des Désertes.