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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

étonné, quand tu liras ce philosophe, de trouver en lui un enthousiasme de charité extraordinaire, une éloquence partant du cœur, enfin toutes les qualités d’un véritable apôtre.

Mais tu feras comme moi, tu voudras conclure, et tu verras, en concluant, que cet homme sincère est un apôtre stérile et ce cœur d’or un cœur qui se trompe.

Channing prêche une seule et simple doctrine, l’Évangile. De là une admirable et excellente tolérance. Lui protestant, il admet à sa communion tous les dissidents, même les catholiques. Il ouvre le temple unitaire de la foi et du salut éternel à tout homme, quel que soit son culte, qui veut y entrer avec cette courte formule : « J’aime Dieu et mon prochain dans l’esprit du Christ. »

Il n’exige pas que l’on croie à la divinité de Jésus si la raison s’y refuse, et n’admet point qu’on raille celui dont la raison admet cette divinité. Il veut que le plus croyant et le moins croyant s’aiment l’un l’autre, tout en aimant Dieu, qu’ils ne se damnent pas, qu’ils ne se contrarient pas, et que nul ne se mêle de leurs affaires. Si cela est possible, rien de mieux ; mais Channing a-t-il trouvé le chemin vers ce temple de la raison et de la liberté soutenues par la foi ?

Certes, il dit tout ce qu’on peut dire de beau, de bon et de bien pour y amener les hommes ; mais il étend cette tolérance à tous les actes de la vie civile et politique. Peu importe, selon lui, la forme, le nom,