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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

ose et qui doit vous dire cela, du fond d’un cœur mille fois brisé et toujours heureux quand même.

GEORGE SAND.


DXXIX

À M. ***


Nohant, avril 1863.


Oui, sans doute, monsieur, je me souviens et je lis votre livre. Vous êtes un noble, vaste et généreux esprit. Mon fils partage vos idées ; car il s’est fait protestant avec sa femme, et compte élever ses enfants dans la croyance avancée de la Réforme, dont vous êtes un des plus éminents et des plus fervents apôtres. Mais, moi, tout en vous aimant et vous admirant du meilleur de mon âme, je serai de moins en moins chrétienne, je le sens, et, chaque jour, je sens aussi poindre une autre lumière au delà de cet horizon de la vie vers lequel je marche avec une tranquillité toujours croissante.

Jésus n’est pas et ne pouvait pas être le dernier mot de la vérité accordée à l’homme. Vous admettez ingénieusement qu’il a semé une vérité progressive à développer. Mais le croyait-il, lui ? Je ne le pense pas. Il était l’homme de son temps, quoique l’homme le plus idéaliste de son temps.