Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 5.djvu/191

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serez le mieux disponible. Nous nous entendrons pour que je ne sois pas en excursion dans ce moment-là. Nous philosopherons au grand soleil, si Dieu nous donne un meilleur été que l’autre. Mais je crois notre philosophie bien droite et bien claire. Le désir maladif de se perdre dans les questions métaphysiques s’apaise quand on en a tâté sérieusement.

Si le cher papa[1], qui croit découvrir des choses rebattues, avait fait quelques vraies études, il affirmerait de moins en moins la nature spéciale et le rôle spécial de Dieu. Contentons-nous de vivre du sentiment qui nous pousse à rêver une perfection relative, et à y croire d’autant plus que nous nous sentons devenir meilleurs.

Au reste, pour en revenir au papa, sa lettre était bonne comme lui et moins fanatique de certitude que la précédente. Sa chimère est celle d’un esprit généreux ; sa vanité, celle d’un cœur très pur.

Quand on voit le genre humain perdu de bêtise et de vice, et la vieillesse, aussi bien que la jeunesse d’à présent, tourner à l’égoïsme et au matérialisme, on est heureux de trouver dans sa famille une belle âme dont les défauts et les travers ne sont que l’excès de qualités sérieuses et d’instincts touchants. Aimez-vous donc quand même. Ne faut-il pas que la famille s’essaye aux habitudes de tolérance et de libre pensée qui doivent gouverner les sociétés futures ?

  1. M. Desplanches. Voir la lettre DCIII, qui lui est adressée.