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core, et jamais pour la dernière fois. Ce mot n’a pas de sens.

G. SAND.


DCLXXIV

À M. GUILLAUME GUIZOT, À PARIS


Nohant, 12 juillet 1868.


On peut, on doit aimer les contraires quand les contraires sont grands. On peut être l’élève pieux de Jean-Jacques, on doit être l’ami respectueux de Montaigne. Rousseau est un réhabilité ; Montaigne est pur, il est le galant homme dans toute l’acception du mot. Sa conscience est si nette, sa raison si droite, son examen si sincère, qu’il peut se passer des grands élans de Jean-Jacques. Celui-ci avait les ardeurs d’une âme agitée. Aucun trouble n’autorisait Montaigne à la plainte. S’il n’a pas songé au mal des autres, c’est que l’image du bien était trop forte en lui pour qu’il entrevît clairement l’image contraire. Il pensait que l’homme porte en lui tous ses éléments de sagesse et de bonheur. Il ne se trompait pas ; et, en parlant de lui-même, en s’observant, en se peignant, en livrant son secret, il enseignait tout aussi utilement que les philosophes enthousiastes et les moralistes émus.

Je ne vois pas d’antithèse réelle entre ces deux