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que du 18 au 20. Attends-moi, puisque tu peux retarder un peu ton départ. Il fait trop mauvais pour aller à Croisset ; c’est toujours pour moi un effort de quitter mon cher nid pour aller faire mon triste état ; mais l’effort est moindre quand j’espère te trouver à Paris.

Je t’embrasse pour moi et pour toute la nichée.


DCCXX

À VICTOR HUGO, À GUERNESEY


Paris, 2 février 1870.


Mon grand ami, je sors de la représentation de Lucrèce Borgia, le cœur tout rempli d’émotion et de joie. J’ai encore dans la pensée toutes ces scènes poignantes, tous ces mots charmants ou terribles, le sourire amer d’Alphonse d’Este, l’arrêt effrayant de Gennaro, le cri maternel de Lucrèce ; j’ai dans les oreilles les acclamations de cette foule qui criait : « Vive Victor Hugo ! » et qui vous appelait, hélas ! comme si vous alliez venir, comme si vous pouviez l’entendre.

On ne peut pas dire, quand on parle d’une œuvre consacrée telle que Lucrèce Borgia : « Le drame a eu un immense succès ; » mais je dirai : Vous avez eu un magnifique triomphe. Vos amis du Rappel, qui sont mes amis, me demandent si je veux être la première à vous donner la nouvelle de ce triomphe. Je le crois