Page:Sand - Cosima.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



ACTE QUATRIÈME

Dans le palais d’Ordonio Éliséi. — Une pièce élégante et mystérieuse, sans fenêtres, éclairée d’en haut. Une seule porte apparente au fond, fermée avec des barres.


Scène PREMIÈRE

ORDONIO, seul, devant sa table ; puis UN DOMESTIQUE.
ORDONIO.

La faire souffrir !… C’était le seul parti à prendre. Avec de la fermeté, on dompte les natures féminines les plus rebelles. Leur force n’est jamais qu’un essai ; leur menace, un défi. Depuis que j’ai su tirer parti du hasard pour éveiller le soupçon dans son âme, sa force et sa fierté se sont évanouies. C’est elle qui m’implore à présent. Elle a abjuré ses remords, sa prudence, sa dévotion et jusqu’à la crainte d’alarmer son mari. Elle oublie tout, absorbée par une seule crainte, occupée d’un seul soin : la crainte d’avoir une rivale, le soin de s’en assurer… Il est bon qu’elle le croie ! Encore quelques jours de cette erreur, et son orgueil est terrassé. Oh ! la femme veut faire souffrir, et elle ne souffre, elle, que quand elle croit ne pas faire souffrir assez… (un domestique entre.) Qu’y a-t-il ?

LE DOMESTIQUE, lui remettant une lettre.

Un message de monseigneur le duc.

ORDONIO.

Donnez !… (Le domestique sort.) Quelque nouvelle confidence amoureuse ! Ce brave prince est d’une candeur qui me ferait sourire, n’était le respect que je lui dois. (Lisant). « Je puis dérober une heure aux affaires. Vous savez à qui je veux la consacrer. Écrivez un mot à la comtesse… Envoyez-lui un page, et qu’elle soit chez vous dans une heure. Tous mes gens sont connus de son mari. » C’est cela ! Il faut que je m’expose en même temps à la fureur de ce bon M. des Uberti,