Page:Sand - Flamarande.djvu/330

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cas-là, l’abbé et moi, nous voulions nous retirer ; elle nous obligeait de rester et de faire notre partie dans un coin. Je dois dire que personne ne fut scandalisé de me voir au salon. Ma réputation de probité et de savoir-vivre était établie dans le pays. Il y avait déjà quinze ans que l’on m’y connaissait.

Je m’étais attendu à des questions, à des insinuations, à de fausses confidences. Il n’en fut rien ; madame ne me reparlait plus d’aucune chose secrète. J’avais refusé de me laisser interroger sous le coup de la première émotion, et, comptant qu’on y reviendrait, j’avais depuis préparé mes réponses ; mais madame se le tint pour dit et n’y revint pas, ce qui semblait être un témoignage de haute déférence pour mon caractère. Elle causait d’autres choses avec moi, absolument comme elle eût fait avec son pareil, et jamais je ne surpris le moindre effort pour influencer mes idées au profit des siennes. Ce n’était pas une bienveillance particulière pour mon petit entendement ; elle était la tolérance même, et tout le monde avait depuis longtemps remarqué que son genre d’esprit ou son caractère était tout l’opposé de ceux de son mari. Elle haïssait la dispute et permettait tout au plus la discussion. Elle était toujours et d’autant plus modeste qu’elle était devenue plus instruite, car depuis plusieurs années elle travaillait pour faire travailler son fils, et son intelligence s’était extraordinairement