Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/233

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sont durs, mais il faut y passer ; sois sûre que j’ai bien fait.

« Nous avons quitté Glaris, il y a quatre jours, pour nous rendre à Constance. Il y a dix-huit lieues de pays qui en valent bien vingt-cinq de France. Nous les avons faites sans nous arrêter, par une pluie battante, arrivant pour bivouaquer dans des prés pleins d’eau.

Mais la fatigue poussée à l’excès fait dormir partout. Nous sommes arrivés pendant le combat, et, le soir, nous étions maîtres de la ville. Les hostilités paraissent tirer à leur fin. Nous sommes allés nous reposer de vingt jours de bivouac dans le village d’où je t’écris. C’est le seul endroit où j’en aie eu la possibilité. Le but qu’on s’était proposé est rempli. La Suisse est évacuée. Nous allons maintenant nous refaire. Ne sois point inquiète de moi, ma bonne mère ; je te donnerai de mes nouvelles le plus souvent possible. Ne sois pas fâchée contre moi, surtout, si je ne t’ai informée qu’aujourd’hui de mes démarches. Mais te dire que j’allais à l’armée, tu n’y aurais jamais consenti, ou tu aurais passé tout ce temps dans des inquiétudes dévorantes. La guerre n’est qu’un jeu ; je ne sais pourquoi tu t’en fais un monstre ; c’est très peu de chose. Je te donne ma parole d’honneur que je me suis fort amusé, à l’attaque du glacis, de voir les Russes gravir les montagnes. Ils s’en acquittent avec une grande légèreté. Leurs grenadiers sont