Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/252

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soumettre à une demi-ration d’appétit. Tu as bien fait de m’engraisser à Paris, car je ne crois pas qu’ici on s’en occupe.

Adieu, ma bonne mère, je t’embrasse bien tendrement ; je voudrais bien que cette nouvelle séparation te fût moins cruelle que les autres.

Songe qu’elle ne sera pas longue et qu’elle aura de bons résultats. » LETTRE LIV.

Prairial an VIII (sans date).

« Ouf ! nous y voilà, nous y voilà ! respirons ! Où donc ? à Milan ; et si nous allons toujours de ce train-là, bientôt, je crois, nous serons en Sicile. Bonaparte a transformé le vénérable état-major général en une avant-garde des plus lestes. Il nous fait courir comme des lièvres, et tant mieux ! Depuis Verres, pas un moment de repos. Enfin, nous sommes ici d’hier, et j’en profite pour causer avec toi. Je vais reprendre notre marche depuis le départ du susdit Verres. Je t’ai parlé, je crois, du fort de Bard, seul obstacle qui nous empêchât d’entrer en Italie. Bonaparte, à peine arrivé, ordonne l’assaut. Il passe six compagnies en revue. « Grenadiers, dit-il, il faut monter là cette nuit, et le fort est à nous. » Quelques instans après, il fut s’asseoir sur le bout d’un rocher. Je le suivis et me plaçai derrière lui. Tous les généraux de division l’entouraient Loison lui faisait de fortes objections sur la difficulté de grimper à travers de rochers, sous