Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/402

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Il est facile de voir par cette lettre si douloureuse, si généreuse et pourtant si habile, que ma grand’mère désirait consulter, pièces en main, afin de faire déclarer, s’il était possible, la nullité du mariage. Elle n’ignorait pas autant qu’elle voulait bien le dire, les noms et précédens de sa belle-fille. Elle feignait de tout ignorer pour ne pas laisser pénétrer ses desseins, et si elle faisait pressentir une sorte de pardon qu’elle n’était encore nullement disposée à accorder, c’était dans la crainte de trouver dans le maire du ….. arrondissement (celui qui avait fait le mariage), un auxiliaire complaisant de ce mariage irrégulièrement contracté. Aussi ne s’adressait-elle pas à lui directement, mais bien au maire du 5e, qu’elle savait ne point avoir la rue Meslay dans sa juridiction, et sur l’intégrité duquel, probablement, elle avait quelques données particulières. La ruse délicate de la femme l’inspirait donc mieux que n’eût pu le faire un habile conseil, et j’avoue que cette petite conspiration contre la légitimité de ma naissance me paraît d’une légitimité tout aussi incontestable.

De son côté, mon père, conseillé probablement par un homme spécial, car de lui-même il fût tombé dans tous les piéges de la tendresse maternelle, devait vouloir cacher son mariage jusqu’au moment où tout délai d’opposition de la part de sa mère serait expiré. Ils se trompaient donc l’un l’autre, triste fatalité de leur