Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/431

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que je n’aime l’existence que pour toi et que je t’ai consacré la mienne. Songe que rien au monde, excepté l’honneur et le devoir, ne peut me retenir loin de toi ; que je suis au milieu des fatigues et des privations de toute espèce ; et qu’elles ne me paraissent rien en comparaison de celle que me laisse ton absence.

Songe que l’espoir seul de te retrouver me soutient et m’attache à la vie.

« Adieu, chère femme, je tombe de fatigue. J’ai un lit pour cette nuit !

D’ici à longtemps je n’en trouverai plus, et je vais en profiter pour rêver de toi. Adieu donc, chère Sophie, je t’écrirai de Dourlach, si je peux. Reçois mille tendres baisers et donnes-en pour moi tout autant à Aurore. Sois sans inquiétude, je sais faire mon métier, je suis heureux à la guerre ; le brevet et la croix m’attendent.

« P.S. Où as-tu pris qu’on payait double en temps de guerre ? C’est plus que le contraire, car il n’est pas seulement question de l’arrivée du payeur. Cependant, comme nous n’avons pas de mer à traverser, et qu’il viendra tôt ou tard, ne crains rien pour moi, et ne me garde rien de l’argent que ma mère aura à te remettre. Ecris-lui pour la prévenir de ton arrivée à Paris. »