Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/598

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belle main à demi paralysée, si faible qu’elle pouvait à peine soutenir ses cartes, était la chose la plus comique qui se puisse imaginer. Aussi ma mère partit d’un rire inextinguible, et se rassit, incapable de rien ajouter à la stupéfaction et à la mortification du pauvre pédagogue.

Mais cette anecdote eut lieu bien longtemps après la mort de mon père.

Il se passa de longues années avant qu’on n’entendît dans cette maison en deuil d’autres rires que ceux des enfans.

Pendant ces années, une vie calme et réglée, un bien-être physique que je n’avais jamais connu, un air pur que j’avais rarement respiré à pleins poumons, me fit peu à peu une santé robuste, et l’excitation nerveuse cessant, mon humeur devint égale et mon caractère enjoué. On s’aperçut que je n’étais pas un enfant plus méchant qu’un autre, et la plupart du temps, il est certain que les enfans ne sont acariâtres et fantasques que parce qu’ils souffrent sans pouvoir ou sans vouloir le dire.

Pour ma part, j’avais été si dégoûtée par les remèdes, et à cette époque, on en faisait un tel abus, que j’avais pris l’habitude de ne jamais me plaindre de mes petites indispositions, et je me souviens d’avoir été souvent près de m’évanouir au milieu de mes jeux, et d’avoir lutté avec un stoïcisme que je n’aurais peut-être pas aujourd’hui. C’est que quand j’étais remise à la