Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

on fait déloger le vieillard qui demeure à côté de ma cellule, je ne pourrai pas l’assister. Après-demain, si je n’ai pas trouvé de quoi payer mon propre loyer, on me chassera moi-même, et on retiendra mon manteau.

Ce matin, la portière qui range ma chambre m’a dit en m’appelant à la fenêtre : « Voici madame qui se promène dans son jardin. » Ce jardin, vaste et magnifique, est séparé par un mur du petit jardin situé au-dessous de moi. Les deux maisons, les deux jardins sont la même propriété, et, de la hauteur où je suis logé, je plonge dans l’une comme dans l’autre. J’ai regardé machinalement. J’ai vu une femme qui m’a paru fort belle, quoique très-pâle et un peu grasse. Elle traversait lentement une allée sablée pour se rendre à une serre dont j’aperçois les fleurs brillantes, quand un rayon de soleil vient à donner sur le vitrage. Encore irrité de ce qui venait de se passer, j’ai demandé à la sorcière si sa maîtresse était aussi méchante qu’elle. « Ma maîtresse ? a-t-elle répondu d’un air hautain, elle ne l’est pas : je ne connais que monsieur, je ne sers que monsieur.

— Alors, c’est monsieur qui est impitoyable ?

— Monsieur ne se mêle de rien ; c’est son premier locataire qui commande ici, heureusement pour lui ;