Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/56

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obscur satellite, je la suivis, et bientôt nous nous trouvâmes dans une loge du quatrième rang, assis tellement au-dessus de la foule, que sa clameur ne nous arrivait plus que comme une seule voix, et que nous étions comme isolés à l’abri de toute surveillance et de toute distraction. Elle commença alors des discours étranges où le plus énergique enivrement se mêlait à la plus adroite réserve ; elle paraissait continuer l’entretien piquant que nous avions commencé en bas, ou du moins passer naturellement de ce fait particulier à une théorie générale sur l’amour. Et comme il me semblait que c’était ou une provocation directe, ou le désir de m’arracher par surprise quelque secret de cœur relatif à Julie, je me tenais sur mes gardes. Mais elle se railla de ma prudence, et après avoir finement fustigé la présomption qu’elle m’attribuait dans les deux cas, elle me força à ne voir dans ses discours qu’une provocation à des théories sérieuses de ma part sur la question brûlante qu’elle agitait. J’étais scandalisé d’abord de cette facilité sans retenue et sans fierté à soulever devant moi le voile sacré à travers lequel j’ai à peine osé jusqu’ici interroger le cœur des femmes ; mais son esprit souple et fécond, une sorte d’éloquence fiévreuse quelle possède, réussirent peu