Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/137

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il n’avait pas remis une seule de ces lettres, car il me les rendit un jour en disant :

— Si je vous avais refusé de m’en charger, vous en eussiez chargé quelque autre qui eût fait la sottise de les remettre. Love était bien assez à plaindre, sans que je vinsse lui monter la tête avec l’exubérance de votre passion.

Je m’étonnais donc de ne pas recevoir de réponse à mes lettres, celles que Love m’écrivait se bornant à résumer en termes toujours clairs et affectueux l’inamovible situation. Plus le temps marchait, plus ces lettres devenaient rares, courtes et dubitatives. Je savais que Hope était sur pied, qu’il montait à cheval avec sa sœur, que la fièvre ne revenait qu’à de longs intervalles, et qu’il avait repris ses études. Plusieurs fois, la nuit, je m’étais introduit dans le parc de Bellevue, et j’avais rôdé autour de la maison ; mais je faisais vainement un appel désespéré à ces heureux hasards qui fourmillent dans les romans, et qui amènent si à propos une insomnie de l’héroïne ou un stratagème ingénieux de l’amant pour se faire entendre et deviner. Jamais je ne vis de lumière aux croisées. Les jalousies et les rideaux étaient strictement fermés, comme dans toute maison aux habitudes régulières et prudentes. Jamais je n’osai lancer un grain de sable ou imiter le cri d’un oiseau. Livrer