Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/146

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le sort de M. Butler, qui était capable de tout supporter et de tout oublier pour une heure de recueillement ou de contemplation. Mes résumés intérieurs ne m’apportaient pas cette joie tranquille et profonde que je lui avais vu savourer en disséquant un insecte ou en interrogeant les veines d’une roche. J’apprenais cependant beaucoup de choses techniques, et, guidé par une sorte d’instinct dont je ne voulais pas me faire l’aveu à moi-même, je me rendais capable de ne plus mériter les sourires de pitié de Junius Black et de devenir utile à M. Butler. Malheureusement, je ne voyais pas Dieu comme il le voyait, lui, à travers les merveilles et les suprêmes révélations de la nature. J’en étais à ce degré d’instruction où l’on n’est encore occupé qu’à battre en brèche les croyances du passé, et où la constatation des faits naturels vous conduit à des conclusions matérialistes d’une froideur désespérante.

Il faut croire que, malgré mon abattement, je conservais un reste d’espoir, car, un jour, en apprenant de M. Louandre qu’il était question de mettre Bellevue en vente et de faire transporter en Angleterre les riches collections de M. Butler, je reçus un grand choc dans tout mon être et m’imaginai que je le recevais pour la première fois. Je pris alors mon parti de changer radicalement les conditions d’une existence que je ne pouvais plus supporter. Ma mère elle-même m’en