Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/155

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saient sur les marches brisées du perron. Cette merveille avait fait son temps. M. Butler n’est jamais revenu dans le pays, pensai-je, car il eût acheté ces fers travaillés de la renaissance qu’il convoitait jadis, et que personne aujourd’hui ne paraît s’être soucié de ramasser.

Au moment de sonner, je me rappelai qu’en quittant la France j’avais écrit à M. Louandre d’affermer la terre. J’avais fait la réserve du château, que je ne voulais pas savoir envahi par des indifférents ; mais Dieu sait ce qui avait pu arriver depuis trois ans que je n’avais donné signe de vie. Un frisson me passa dans tout le corps. Je tremblai de trouver des inconnus installés dans le sanctuaire de mes souvenirs, et jusque dans le lit où ma mère était morte. Le faible bruit de mes pas n’avait éveillé personne. Seulement, un petit chien qui me sentait là, derrière la porte, aboyait d’une voix perçante. Ce chien aussi était pour moi un étranger, et c’est en étranger qu’il me traitait lui-même en appelant ses maîtres pour me chasser.

Je n’eus pas le courage de vouloir entrer avant de savoir par qui le château était habité. Je revins sur mes pas. Je me glissai dans l’écurie, espérant y trouver quelque domestique ; mais il n’y avait là que deux bêtes : un mulet pour le service de la ferme ou du moulin, et un vieux cheval décharné que je ne re-