Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/38

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sans douceur. Je me retirai dans la solitude. Un vaste monastère abandonné et à demi renversé par les orages des révolutions s’offrit à moi comme une retraite imposante et profonde. Il était situé dans une de mes terres. Je m’emparai d’une cellule dans la partie la moins dévastée des bâtimens. C’était celle qu’avait jadis habitée le prieur. On voyait encore sur le mur la marque des clous qui avaient soutenu son crucifix, et ses genoux habitués à la prière avaient creusé leur empreinte sur le pavé, au-dessous du symbole rédempteur. Je me plus à revêtir cette chambre des austères insignes de la foi catholique : une couche en forme de cercueil, un sablier, un crâne humain, et des images de saints et de martyrs élevant leurs mains ensanglantées vers le Seigneur. À ces objets lugubres qui me rappelaient que j’étais désormais morte aux passions humaines, j’aimais à mêler les attributs plus rians d’une vie de poëte et de naturaliste : des livres, des ins-