Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/48

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soleil du haut d’une terrasse à demi écroulée, dont une partie s’élevait encore entourée et comme portée par ces sculptures monstrueuses dont le catholicisme revêtait jadis les lieux consacrés au culte. Au-dessous de moi, ces bizarres allégories alongeaient leurs têtes noircies par le temps, et semblaient comme moi se pencher vers la plaine pour regarder silencieusement couler les flots, les siècles et les générations. Ces guivres couvertes d’écailles, ces lézards au tronc hideux, ces chimères pleines d’angoisses, tous ces emblêmes du péché, de l’illusion et de la souffrance, vivaient avec moi d’une vie fatale, inerte, indestructible. Lorsqu’un des rayons rouges du couchant venait se jouer sur leurs formes revêches et capricieuses, je croyais voir leurs flancs se gonfler, leurs nageoires épineuses se dilater, leurs faces horribles se contracter dans de nouvelles tortures. Et en contemplant leurs corps engagés dans ces immenses masses de pierre que ni la main des