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LVII

Et, tout en continuant de chanter, Zilla rêvait au mystère d’amour caché dans le sein de ce petit être qui ne savait ni raisonner, ni marcher, ni parler, et qui déjà savait aimer, regretter, vouloir et souffrir, « Eh quoi ! se disait la fée, je n’aurai pas raison de cette résistance morale qui n’a pas conscience d’elle-même ! » Elle changea de mélodie, et, dans cette langue sans paroles qu’Orphée chanta jadis sur la lyre aux tigres et aux rochers, elle crut soumettre l’âme de l’enfant à l’ivresse des rêves divins.

LVIII

Ce chant fut si beau que les pins de la montagne en frémirent de la racine au faite, et que les rochers en eurent de sourdes palpitations ; mais l’enfant ne se consola point et continua de gémir. Zilla invoqua l’influence magique de la lune ; mais le pâle visage de l’astre effraya l’enfant, et la fée dut prier la lune de ne plus la regarder. La cascade, ennuyée des pleurs qu’elle prenait pour un défi, se mit à rugir stupidement ;