Page:Sand - La Daniella 1.djvu/194

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séquences ; mais l’œil clair et la figure enjouée de Mariuccia ne permettaient pas le soupçon, et, dans ses réponses subséquentes, je ne vis que l’empressement d’une bienveillance irréfléchie pour sa nièce et pour moi.

— S’il en est ainsi, pensai-je, je dois avoir une franchise égale.

Et, comme la Daniella ne reparaissait pas, je priai sa tante de monter avec moi dans ma chambre, où nous la trouvâmes occupée à brosser mes habits et à ranger mes ustensiles de toilette, comme si elle eût été à mon service.

— Que faites-vous là ? lui dis-je en entrant, avec un peu de dureté.

Elle me regarda avec un mélange de décision et de douceur qui paraît être dans son caractère comme sur sa physionomie.

— Je nettoie et je range votre appartement, répondit-elle, comme je faisais à Rome, pendant que vous étiez malade.

Le souvenir des soins empressés et intelligents de cette bonne fille me fit rougir de ma brusquerie.

— Ma chère enfant, lui dis-je, asseyez-vous, et causons. Je veux savoir comment je suis la cause de votre séparation d’avec la famille B***. Vous avez dit, à ce sujet, ce que vous avez cru devoir dire ; il faut que je le sache, afin de redresser la vérité si vous vous êtes trompée en ce qui me concerne.

— C’est aisé à dire, répondit-elle avec assurance. Vous avez fait le projet d’épouser la Medora. Comme vous avez beaucoup d’esprit, vous avez deviné que, pour la rendre amoureuse de vous, elle qui n’a jamais pu être amoureuse de personne, il fallait faire semblant de devenir amoureux d’une autre, sous son nez, et vous avez réussi à le lui persuader. Moi, j’aurais été sacrifiée à ce jeu-là, si j’avais eu affaire à de mauvais maître ; mais lady Harriet est géné-