Page:Sand - La Famille de Germandre.djvu/120

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Resté seul, le chevalier remplit son verre et l’avala posément en homme qui, à l’occasion, savait reprendre possession de lui-même. Debout et calme devant la table, il résumait rapidement et clairement ses pensées.

— Cet Octave est un duelliste, se disait-il, et ce duelliste s’est moqué de moi. Je ne m’en suis pas aperçu, ou plutôt je m’en doutais et je ne voulais pas y croire. Je me disais que le défaut d’usage rend susceptible et injuste ; d’ailleurs, un proche parent !… un brave officier ! un homme d’esprit !… — C’est donc ainsi que va le monde ? Un salut manqué, un habit passé de mode vous exposent à la risée de ceux qui devraient vous avertir, et même au besoin vous défendre ! — Allons, soit ! je ne fuirai pas devant le ridicule, et je vais entrer le dernier, tout seul, dans cette belle assemblée ! Je veux voir en face ce grand monde, et savoir si un homme de cœur et d’honneur qui a souffert toute sa vie sans se plaindre doit être persiflé par des sots ! Je veux saluer les dames sans renverser les meubles, et forcer les hommes à me saluer sans rire ! Je veux sor-