Page:Sand - La Filleule.djvu/218

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— Ne comptez pas trop là-dessus, reprit-elle, je ne sais pas qui vous êtes, et, avant tout, je veux le savoir. Ce n’est pas que je vous craigne : la branche qui nous sert de conducteur ne pourrait pas vous porter, et je serais à la maison avant que vous eussiez franchi le mur. Je n’ai là qu’un coup de sonnette à donner pour réveiller tout le monde ; je crierais au voleur, et alors gare à vous !

— Je vois, Morenita, que je m’étais trompé, répondit la voix ; vous vous méfiez de moi. Un autre à ma place s’en affligerait ; moi, je m’en réjouis et vous en félicite. Voulez-vous savoir pourquoi ?

— Oui, quand vous aurez dit qui vous êtes.

— Un seul mot répondra aux deux questions : Morenita, je suis ton frère !

— Oh ! mon Dieu, est-ce vrai ? s’écria l’enfant crédule. Oh ! que je voudrais vous voir !

— C’est bien facile, répondit l’inconnu, qui était à cheval sur le mur ; je vais vous passer mon échelle, qui est fort légère. Nous irons dans l’appartement de ce jardin, dont le portier, qui me connaît et qui a confiance en moi, m’a remis les clefs.

— Non, non, dit Morenita en se ravisant. Ce serait mal.

— Mal ! reprit le jeune homme. Un frère et une sœur ?

— Et qui me prouve que vous disiez la vérité ? Voyons, êtes-vous noir comme moi ?

— Plus noir que vous.

— Alors, vous êtes d’origine indienne.

— Précisément.

— Il me semble que votre voix ressemble à la mienne et qu’elle m’est connue, comme si ce n’était pas la première fois que je l’entends.

— C’est pourtant la première fois que je vous parle, et