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la petite fadette

point droit de s’en offenser. Elle ne pouvait pas le suspecter de la vouloir tromper sur la force de cet amour-là, car c’était une espèce d’amour comme on n’en voit pas souvent chez les gens de campagne, lesquels aiment plus patiemment que ceux des villes. Et justement Landry était un caractère patient plus que d’autres, jamais on n’aurait pu présager qu’il se laisserait brûler si fort à la chandelle, et qui l’eût su (car il le cachait bien) s’en fût grandement émerveillé. Mais la petite Fadette, voyant qu’il s’était donné à elle si entièrement et si subitement, avait peur que ce ne fût feu de paille, ou bien encore qu’elle-même prenant feu du mauvais côté, la chose n’allât plus loin entre eux que l’honnêteté ne permet à deux enfants qui ne sont point encore en âge d’être mariés, du moins au dire des parents et de la prudence : car l’amour n’attend guère, et, quand une fois il s’est mis dans le sang de deux jeunesses, c’est miracle s’il attend l’approbation d’autrui.

Mais la petite Fadette, qui avait été dans son apparence plus longtemps enfant qu’une autre, possédait au dedans une raison et une volonté