Page:Sand - La Ville noire.djvu/158

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
la ville noire.

mit de lui ôter toute autorité ; mais, comme il lui fallait le temps d’en mettre un autre à sa place, il dut, en attendant, embaucher des compagnons-passants, et se trouver pendant plusieurs jours au milieu d’étrangers qu’il dirigea lui-même, avec peu d’entrain et beaucoup d’ennuis. Il résolut alors d’affermer sa propriété et d’en louer une mieux située, ce qu’il espérait pouvoir faire sans grande perte. Il entra en pourparlers avec des gens qui lui offrirent de la baraque un prix si minime que le découragement s’empara de lui. — Oui, oui, se disait-il, Tonine avait bien raison ! Cet endroit-ci ne vaut rien, et peut-être a-t-elle deviné aussi que je n’étais bon à rien moi-même.

À tous ses mécomptes venait se joindre le dégoût du travail grossier auquel il s’était condamné pour gagner de l’argent, lui si fier autrefois de la beauté de sa main-d’œuvre. — Elle doit me mépriser pour cela, se disait-il encore. Autrefois elle admirait mes ouvrages, elle me traitait d’artiste dans ses bons jours. Peut-elle à présent faire une différence entre moi et le dernier des cloutiers ? Et si en