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— Mais votre seigneurie sait sans doute ce qu’il y avait dans sa bourse ?

— À peu de chose près. » Et en parlant ainsi, Consuelo faisait la revue de ses poches, et n’y trouvait pas une obole. « M. Schwartz, lui dit-elle avec une gaieté courageuse, on ne m’a rien laissé, à ce que je vois. Il faudra donc que je me contente du régime des prisonniers. Ne vous faites pas d’illusions là-dessus.

— Eh bien, madame, reprit Schwartz, non sans faire un visible effort sur lui-même, je vais vous prouver que ma famille est honnête, et que vous avez affaire à des gens estimables. Votre bourse est dans ma poche ; la voici ! » Et il fit briller la bourse aux yeux de la Porporina, puis il la remit tranquillement dans son gousset.

« Puisse-t-elle vous profiter ! dit Consuelo étonnée de son impudence.

— Attendez ! reprit l’avide et méticuleux Schwartz. C’est ma femme qui vous a fouillée. Elle a ordre de ne point laisser d’argent aux prisonnières, de crainte qu’elles ne s’en servent pour corrompre leurs gardiens. Mais quand les gardiens sont incorruptibles, la précaution est inutile. Elle n’a donc pas jugé qu’il fût de son devoir de remettre votre argent au gouverneur. Mais comme il y a une consigne à la lettre de laquelle on est obligé, en conscience, de se conformer, votre bourse ne saurait retourner directement dans vos mains.

— Gardez-la donc ! dit Consuelo, puisque tel est votre bon plaisir.

— Sans aucun doute, je la garderai, et vous m’en remercierez. Je suis dépositaire de votre argent, et je l’emploierai, pour vos besoins comme vous l’entendrez. Je vous apporterai les mets qui vous seront agréables ;